Dans un contrat, la clause pénale est la clause qui fixe la somme d’argent qui doit être payée par la partie contrat qui n’exécute pas ses obligations (ex. : si le vendeur ne respecte pas la clause d’exclusivité, il devra payer 100.000 € à son fournisseur).
La clause pénale est présente dans de très nombreux contrats. Toutes les clauses pénales ne sont pas autorisées, cependant. Les lignes qui suivent résument les règles qui y sont applicables.
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La clause pénale, instrument dissuasif
La clause pénale a pour objectif d’inciter le débiteur à respecter ses obligations. Dès le départ, le débiteur est au courant du montant qu’il devra payer s’il n’exécute pas le contrat.
En cela, la clause pénale présente l’avantage que la partie qui se plaint de la non-exécution du contrat ne doit pas démontrer l’étendue de son préjudice : la seule violation du contrat suffit à justifier une indemnisation. En d’autres termes : le contrat était piégé.
Aussi utile que puisse être la clause pénale pour assurer le respect de la parole donnée, tout n’est pas permis. La loi impose des limites à la liberté des parties et permet, selon les cas, soit de réduire le montant de la sanction, soit d’annuler purement et simplement la clause pénale.
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La clause pénale en droit des contrats : la clause pénale excessive peut être réduite
On l’a dit, la clause pénale est destinée à faciliter l’indemnisation du préjudice subi par celui dont les droits sont méconnus, et – par anticipation – dissuader de toute violation ; la clause pénale ne peut pas servir à sanctionner le débiteur qui n’exécute pas sa part du contrat.
La conséquence en est que la clause pénale dont le montant est excessif (ou, en d’autres termes : dont le montant est « plus qu’indemnitaire ») peut être réduite par le juge.
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La clause pénale doit correspondre au préjudice prévisible
Le juge ne peut cependant pas tout changer. Peut seule être réduite la clause pénale dont le montant « excède manifestement » le montant que les parties pouvaient fixer pour réparer le dommage résultant de l’inexécution de la convention (article 1231, § 1er du Code civil).
Le juge doit se référer au « préjudice prévisible » en se plaçant rétrospectivement au moment de la conclusion du contrat en vue de la confronter avec le préjudice qui, à ce moment, pouvait être prévu par les parties comme conséquence d’une inexécution éventuelle.
Lorsqu’il fait application de l’article 1231 du Code civil, le juge ne peut exercer qu’un contrôle marginal en se replaçant au jour de la conclusion de la convention. Il ne peut pas se référer au préjudice effectivement subi.
Ce n’est que s’il est établi que le montant exigé à titre indemnitaire est « certainement, incontestablement et indubitablement excessif, en ce sens qu’il est établi qu’aucune personne raisonnable concluant un tel contrat n’évaluerait forfaitairement l’indemnité du dommage prévisible à ce moment à une somme aussi importante (que) le juge peut réduire la somme originairement stipulée. (…) Il se doit certainement de résister à la tentation de modifier post factum la teneur du contrat dans les causes où la clause pénale n’excède pas manifestement le montant de l’éventuel dommage, en allouant une indemnité « équitable » par le motif qu’à son sens, le dommage est surévalué. » [1]
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Le contrôle de la clause pénale en pratique
Le juge peut donc réduire la clause pénale, pourvu toutefois qu’au moment de la conclusion du contrat, le montant convenu par les parties ne pouvait pas correspondre au dommage prévisible.
En pratique, la jurisprudence tend à valider la clause pénale dont le montant décroît au fur et à mesure de l’exécution de la convention et qui est calculée en fonction du nombre de « trimestre(s) entier(s) d’obligation restant à courir » [2] (par exemple, lorsqu’un contrat d’exclusivité est respecté pendant un certain nombre de mois, mais violé en fin de course).
Trois précisions doivent encore être faites sur le dommage réellement subi (au-delà, ou en deçà du forfait défini dans la clause pénale).
- Si le dommage subi est finalement supérieur au montant prévu par la clause pénale, il n’est possible de solliciter un complément que si le contrat le mentionne expressément. Sinon, le forfait s’impose. Le créancier veillera donc à insérer dans le contrat une clause telle que « la clause pénale existe sans préjudice de la possibilité pour le créancier de solliciter l’indemnisation de son préjudice réel si celui-ci est supérieur » (ou toute autre indication de même effet).
- Si le juge réduit le montant de la clause pénale, il ne peut réduire ce montant à un niveau inférieur à celui du préjudice réellement subi.
- La clause pénale ne peut pas être invoquée contre un tiers au contrat, même si celui-ci est tiers-complice du manquement contractuel (ex.: le nouvel employeur savait que son nouveau collaborateur était tenu par une clause de non-concurrence mais l’a engagé malgré tout : il est tiers-complice, mais ne peut être tenu de payer la clause pénale).
Enfin, précisons que le montant du forfait prévu par la sanction pénale peut encore être réduite par le juge lorsque l’obligation principale a été exécutée (en partie). Le débiteur qui aurait manqué une échéance peut encore tenter de rattraper son manquement pour bénéficier d’une réduction de la sanction [3].
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La clause pénale abusive peut être annulée (droit de la consommation)
Dans les contrats conclus entre une entreprise et un consommateur, la clause pénale fait l’objet d’un contrôle renforcé.
Ici, la clause pénale dont le montant serait supérieur au dommage prévisible lors de la conclusion du contrat sera annulée (et non pas simplement réduite). Le juge pourra cependant encore indemniser l’existence d’un préjudice lorsqu’il est prouvé.
En outre, la clause pénale prévue dans un contrat conclu avec un consommateur doit être “réciproque”. En d’autres termes, la clause pénale est nulle si le contrat ne prévoit pas une « indemnité du même ordre à charge de l’entreprise qui n’exécute pas [ses propres obligations] » (art. VI.83 du Code de droit économique). Ce type de règles est très utile pour remettre en cause les conditions générales d’entreprises qui travaillent habituellement avec des contrats d’adhésion à accepter “clef sur porte” (ex. : contrat de transport en commun, contrat de fourniture d’énergie, etc.)
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Pour en savoir plus sur le sujet de la clause pénale, vous pouvez également consulter les sources de qualité qui suivent :
- C. BIQUET-MATHIEU, Les clauses pénales – Rapport belge, Association Henri CAPITANT Journées trilatérales Espagne – Québec – Belgique « Questions choisies de droit privé », Barcelone, 28 et 29 octobre 2010
- M. RENARD-DECLAIRFAYT, “La modalisation de la force exécutoire de l’acte notarié à propos de la clause pénale” in Liber amicorum Paul Delnoy, Bruxelles, Larcier, 2005.
- J. VAN CAMPERNOLLE, L’astreinte, Bruxelles, Larcier, 1992, v. : « Astreinte et clause pénale ».
- P. WERY, « Le contrôle judiciaire relatif aux clauses applicables à un manquement contractuel : un contrôle aux multiples facettes », in Théorie générale des obligations et contrats spéciaux : questions choisies, CUP, Bruxelles, Larcier, 2016.
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[1] Conclusions de Monsieur l’avocat général Bresseleers sur Cass., 30 mars 2001, C000062N
[2] Liège, 30 mars 2006, J.L.M.B., 2006, liv. 37, p. 1636 ; Liège, 24 mai 2012, 2011/RG/686.
[3] Ceci suppose que l’obligation puisse encore être exécutée. Il doit s’agir d’une obligation de faire (ex. : livrer telle prestation) et non pas d’une obligation de ne pas faire (obligation de non-concurrence).
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