Amende, SNCB, prescription, avocat

L’amende que vous a imposée la SNCB est-elle prescrite ?

Il y a quelques semaines, nous consacrions un billet au caractère abusif de certaines amendes imposées par la SNCB et d’autres compagnies de transport (TEC, STIB). Depuis lors, plusieurs développements intéressants ont eu lieu, justifiant qu’une suite soit donnée à nos propos.

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La prescription des amendes de la SNCB : un ou cinq ans ?

Fort récemment, l’asbl de protection des consommateurs Test-Achat publiait sur son site internet une note affirmant que les amendes de la SNCB étaient prescrites en un an. En d’autres termes, la SNCB ne pourrait plus réclamer le paiement des amendes devant un juge si plus d’un an s’est écoulé entre la verbalisation par l’agent de la SNCB et l’introduction d’une action judiciaire en recouvrement de somme (par voie de « citation » à comparaître devant le juge, délivrée par huissier de justice).

Or, selon nos informations, il se fait que dans bien des cas la SNCB n’a pas respecté ce délai d’un an, en sorte que les voyageurs verbalisés seraient libérés de leur obligation de payer l’amende, s’ils ne l’ont déjà fait.

Sur son site internet, la SNCB contre-attaque en affirmant que le fait de voyager sans ticket constituerait une infraction pénale, en sorte le délai de prescription serait en fait un délai quinquennal. Selon cette thèse, le paiement des amendes pourrait encore être exigé pourvu que le juge ait été saisi dans les cinq ans de la verbalisation.

Qu’en penser ?

La loi du 25 août 1891 portant révision du titre du Code de commerce concernant les contrats de transport dispose que les créances qui résultent d’une convention de transport sont prescrites après un délai d’un an. Toutefois, par exceptions, « Les actions nées du contrat de transport des personnes, à l’exception de celles qui résultent d’un fait qualifié par la loi pénale, sont prescrites par un an. »

Tout dépend donc de la question de savoir si voyager sans titre de transport peut être considéré, oui ou non, comme un délit pénal. La SNCB se prévaut de plusieurs décisions allant en ce sens. Pourtant, une telle qualification n’est pas évidente ; elle dépend des circonstances de l’espèce et du respect d’un certain nombre de formalités nécessaires pour prouver l’existence du délit.

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Les circonstances de la verbalisation décident du délai de prescription

Ainsi, – et c’est frappé au coin du bon sens – pour bénéficier d’un délai de prescription quinquennal, il faut d’abord que la SNCB soit à même de prouver l’infraction, ce qui ne peut se faire que moyennant la production du document de verbalisation (le « formulaire 170 »). Or, il apparaît que dans un certain nombre de cas, le cabinet d’huissier Modero chargé de poursuivre le paiement des amendes de la SNCB est incapable de produire ce document de constat.

Dans le même ordre d’idée, il est requis que l’agent verbalisant soit assermenté pour que ses constations fassent foi (article 10 de la loi du 25 juillet 1891 révisant la loi du 15 avril 1843 sur la police des chemins de fer). Or, il apparaît que dans un certain nombre de cas, l’identité de l’agent verbalisant n’est pas reprise sur le document de verbalisation. De même, le constat doit nécessairement porter indication des dispositions violées (soit, l’indication l’infraction reprochée).

Les circonstances entourant la rédaction du constat sont donc à même d’influer sur la qualification des faits en infraction pénale ou non.  Rappelons encore qu’en principe tout constat d’infraction pénale doit être transmis en copie au Parquet ainsi qu’à l’usager, faute de quoi, il s’agirait d’une atteinte aux droits de la défense. Tous ces éléments constituent autant d’indices permettant au juge d’apprécier s’il est confronté à une infraction pénale ou non.

L’examen des circonstances de la verbalisation est donc au centre des débats en ce qui concerne le délai de prescription applicable. A cet égard, les capacités d’adaptation de la SNCB sont mises à l’épreuve. Après avoir été relativement laxiste quant aux formes entourant la rédaction des constats d’infraction, il n’est pas impossible que l’entreprise de chemin de fers se montre plus vigilante à l’avenir quant au respect des formes prévues par la loi pour la constatation d’un délit pénal.

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Enfin, nous clôturerons cette note en rappelant que, quel que soit le délai de prescription devant être retenu (annuel ou quinquennal) :

  • (i) un simple rappel de paiement, même envoyé par huissier, ne constitue pas un acte interruptif de prescription ; et que
  • (ii) le choix de démarches de rappel plus onéreuses que nécessaires pour un même effet (ex. : recours à un huissier pour procéder à un rappel plutôt que recourir à un simple courrier) doivent être laissées à charge du créancier – soit, dans notre cas, la SNCB –, qui ne pourra pas en demander le remboursement devant le juge.

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Rappelons ici que les développements repris ci-dessus sont pour l’essentiel transposables aux amendes imposées par tout transporteur (TEC, STIB, etc.).

Si vous souhaitez en savoir plus à ce sujet, n’hésitez pas à nous contacter.